Msemmen, مسمن

Publié le 9 décembre 2025 à 06:40

Difficulté : Plutôt Facile
Préparation : Assez longue
Quantités : Pour 7 msemmen


Peu de monde est capable de résister à ces pains plats feuilletés qui sont beaucoup plus simples à réaliser le matin que des croissants et pourtant presque aussi bons que les meilleures de ces viennoiseries.

Le mot msemmen vient très probablement du mot tamazight "semneni", écrit "ⵙⵎⵏⴻⵏⵉ" qu'on peut traduire par "empiler", "accumuler" ou "superposer", et qui fait référence au feuilletage de la pâte à l'aide d'une matière grasse réalisé avant cuisson.

Le msemmen, comme le couscous, la rfissa ou le baghrir, est un plat de tradition amazigh assez ancien et répandu dans tout le maghreb sous des appellations plus ou moins différentes. Pour info, "tamazight" c'est le nom de la langue et "amazigh" celle du peuple qu'on connait davantage sous le terme moins apprécié de "berbère". Le msemmen donc s'apelle ainsi "msenette", "mtaoui" ou encore maarek en Algérie, "meloui" ou "rghaif" au Maroc ou encore "mlaoui" en Tunisie. Le nom le plus commun dans les trois pays reste msemmen, qui peut également être orthographié de différentes manières. Et ces appellations sont parfois communes à deux régions transfrontalières, alors l'attribution à un pays elle-même n'est parfois pas garantie.

On trouve apparemment des trace de ce pain feuilleté dès le XIIIème siècle dans le recueil de recettes Fudalat al-khiwan écrit par Ibn Razin al-Tuyibi, un érudit andalou.
Je n'ai malheureusement pas réussi à accéder au document en question mais la chose est reprise plusieurs fois et elle parait fort possible au vu de sa répartition élargie et des différentes dénominations de ce que beaucoup appellent des crêpes feuilletées 

En effet, pour revenir sur l'introduction et pour tirer les choses au clair, j'appelle personnellement les msemmen des pains plats et non des "crêpes feuilletées". Ma définition de crêpe, c'est une pâte plus ou moins liquide qu'on verse sur une surface chaude comme les pancakes nord-américains, les dorayaki japonais ou les tiganites grecs. Or, pour faire des msemmen on petrit une pâte qu'on étale ensuite sur un plan de travail, avant de réaliser le feuilletage et de faire cuire le résultat obtenu. Et ça, pour moi, c'est du pain. Un pain plat certes, plus semblable à ses cousins orientaux, mais un pain.

On pourrait en effet le comparer au pide répandu de Grèce jusqu'en Egypte en passant par le Liban ou encore davantage au chapati indien. Mais en vérité, il a beaucoup de cousins véritablement feuilletés partout dans la même zone géographique voir plus loin encore.

On peut déjà citer le paratha indien mais également le katmer turque, le kattama du Kyrgyztan ou même les lao bing ou cong you bing chinois. Au Yemen, les malawach font également penser étymologiquement au mlaoui de Tunisie. Et ces pains sont très similaires, même si le feuilletage est dans la plupart des cas réalisé en "tourbillon" plutôt qu'avec des plis et pour un résultat final plutôt rond. Les msemmen eux mêmes sont parfois ronds, et on les trouvera d'ailleurs plus souvent sous cette forme dans les commerces en version surgelée, mais leur version la plus reconnaissable pour du fait maison est en forme de grand carrés.

 

Un msemmen déchiré sur le haut de la pile avec feuilletage apparent.


Mais si le msemmen est aussi répandu en Afrique du Nord, pourquoi choisir l'Algérie pour le représenter ?

En effet, l'Algérie et le Maroc qui ont toujours entretenu une certaine rivalité, qui s'est malheureusement renforcée ces dernières années, se livrent une guerre sans merci sur les réseaux sociaux et sur internet en général en accusant toujours l'autre de voler ses spécialités culinaires. Mais comme on l'a vu, les spécialités amazighs sont souvent anciennes et, ce peuple n'ayant à la base pas de frontières définie, chaque pays du Maghreb est jusqu'à preuve du contraire tout à fait légitime pour revendiquer ces plats.

J'ai déjà attibué le baghrir au Maroc, l'autre "crêpe" la plus connue du petit déjeuner ou de la collation maghrébine. Ça tient plus du subjectif et du fait que j'ai découvert ce plat lors de voyages au Maroc, et de l'attachement qu'ont ma sœur et mon beau-frère marocain pour celui-ci.

Et donc, en partie pour attribuer cette deuxième "crêpe" la plus connue à "l'autre camp", mais aussi parce qu'une pâtisserie avec une tenancière algérienne pas loin de chez moi et où on aime aller en fait de très chouettes, j'ai décidé de manière tout à fait arbitraire de la ranger dans cette catégorie. 

Pardon ? Ça fait deux fois que j'appelle le msemmen "crêpe" au lieu de "pain" ? Ah...

Bon, j'imagine que c'est en effet parfois bien pratique de passer de l'un à l'autre de ces termes, alors allez, je vais être magnanime. Je vous donne le droit d'appeler ça "crêpe feuilletée" si vous voulez, mais juste à vous, alors ne le dites à personne.


Ingrédients

  • 300 g de farine
  • 300 g de farine de blé dur (ou semoule extra fine)
  • 10 g de sel
  • 10 g de sucre
  • 400 ml d'eau
  • 100 g de beurre
  • 100 ml d'huile neutre

    Pour la sauce au miel (Optionnel) : 
  • 40 g de beurre
  • 4 càs de miel
  • 1 càc d'eau de fleur d'oranger

Réalisation

 

  • Mélanger les deux farines dans un robot ou à la main avec le sel, la levure et le sucre. La pâte doit être homogène, à peine collante et élastique.

  • Séparer la pâte en 7 morceaux, eux même séparés en 2 pour un total de 14 petites boules grosses comme une balle de ping-pong. Les huiler.

  • Faire fondre le beurre et le mélanger à l'huile neutre et au reste de levure chimique.

  • Sur une toile à étaler ou un plan de travail bien lisse, mettre un peu du mélange beurre/huile et étaler grossièrement deux petites boules à la main. Les huiler, les superposer et les étaler le plus finement possible. Ça se fait à la main normalement mais pour cette étape je préfère le rouleau, huilé lui aussi. Le but est vraiment d'étaler avec de l'huile et du beurre, sans en mettre trop mais surtout sans utiliser de farine ou de semoule extra-fine. Il faut de la place et dans l'idéal le résultat doit être un peu transparent.

  • Huiler/beurrer toute la surface, ajouter quelques pincée de semoule extra-fine et replier le msemmen obtenu en rabattant chaque côté au centre du disque pour former un carré qui devrait faire dans les 10-15 cm de côté. Faire de même avec les autres boules et réserver.

Voilà ce qu'on doit obtenir à la fin. Il paraissent petit mais il faut les laisser reposer un peu pour qu'ils absorbent le beurre et l'huile avant de les réaplatir.

 

  • Prendre une poêle à crêpes et la faire chauffer à feu moyen vif. Récupérer le premier msemmen réalisé et l'étaler doucement avec la main pour le faire presque doubler de volume. C'est plus facile après qu'il ait un peu reposé le temps de faire les autres, d'où l'importance de l'ordre d'exécution. 

Un msemmen ayant reposé et réaplati (à gauche) comparé à un msemmen qui vient d'être replié (à droite)

 

  • Utiliser le reste du mélange beurre/huile pour huiler la poêle et y placer le premier msemmen réaplati. Bien surveiller la cuisson en le retournant régulièrement tout en façonnant le deuxième msemmen.

  • Une fois le msemmen bien doré mais pas (trop) bruni de chaque côté, le mettre dans un torchon en le repliant pour qu'il garde sa chaleur. Faire de même avec chaque msemmen. 

  • (Optionnel) Une fois chaque msemmen cuit, couper le feu. Mettre un morceau de beurre, quelques cuillères de miel et une càc d'eau de fleur d'oranger dans une casserole. Faire fondre et bien mélanger le tout.

  • Servir les msemmen avec la sauce sucrée obtenue, de la confiture, juste du miel ou avec du fromage, de la charcuterie halal ou ce que vous voulez.

شهية طيبة, shahiat tayiba

"Bon appétit" de manière littérale


Source : L'excellente recette de Saleha du site Aux Délices du Palais, avec de très légères adaptations en plus.

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